Le blog des éditions Libertalia

La Fnac retire de la vente Antifa le jeu dans L’Obs

mercredi 30 novembre 2022 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié sur le site de L’Obs le 28 novembre 2022.

Sous la pression de l’extrême droite, la Fnac retire de la vente un jeu de société antifasciste

Le jeu de société « Antifa » est un jeu de simulation visant à faire vivre un groupe antifasciste local. Son retrait a entraîné de vives critiques des députés « insoumis ».

Bad buzz pour la Fnac

Disponible à la vente le 10 novembre, « Antifa, le jeu » a été retiré des étagères et du site Internet de l’enseigne, sous la pression du Syndicat de commissaires de la Police nationale (SCPN) et de plusieurs élus du Rassemblement national.
« Ce “jeu” est en vente à la Fnac. Un commentaire pour ainsi mettre en avant les antifas, qui cassent, incendient et agressent dans les manifestations ? », a interpellé le SCPN. Le jeu de cartes, édité par le site antifasciste La Horde, était, avant d’être commercialisé sous forme de jeu de société, utilisé comme outil de formation par les militants.

Samedi 26 novembre, plusieurs élus RN, comme le député Grégoire de Fournas, ont épinglé la Fnac et réclamé le retrait du jeu de société. « Case 1 : “je bloque une fac” ; case 2 : “je tabasse un militant de droite” ; case 3 : “j’attaque un meeting du RN” ; case 4 : “je lance un cocktail Molotov sur les CRS” », a tweeté l’élu de la Gironde, en demandant : « La Fnac, vous n’avez pas honte ? » Précisons que ces cases n’existent pas, les cartes du jeu « Antifa » étant bien plus modérées que dans l’imagination du député.

La Nupes demande la création d’une commission d’enquête pour « surveiller » les groupuscules d’extrême droite

« Nous comprenons que la commercialisation de ce “jeu” ait pu heurter certains de nos publics. Nous faisons le nécessaire pour qu’il ne soit plus disponible dans les prochaines heures », a finalement tweeté le compte officiel de l’entreprise, dimanche 27 novembre en fin de journée. Dans la boutique Fnac en ligne, la page du jeu n’était plus accessible ce lundi dans la matinée, même si le jeu était encore affiché dans les résultats de recherche.
Les réactions outrées à gauche n’ont pas tardé à déferler sur les réseaux sociaux. Libertalia, qui a édité le jeu, a dénoncé des « allégations mensongères émanant de l’extrême droite puis des forces de répression » qui ont entraîné le retrait d’un « outil de formation conçu par La Horde et Libertalia »« Vous ne nous ferez pas taire ! », a ajouté l’éditeur sur Twitter.
Sur Twitter, l’organisation Action Antifasciste Paris-Banlieue a critiqué la censure de la Fnac et a interpellé l’entreprise, car son site propose aussi, au rayon littérature, « Le Grand remplacement » de Renaud Camus, un texte qui a inspiré le terroriste de Christchurch en 2019.
« La Fnac en 2022 : vendre les ouvrages de Zemmour et autres idéologues d’extrême droite, cesser de vendre un jeu de société édité par Libertalia sous pression de l’extrême droite », s’est insurgée la députée « insoumise » Mathilde Panot. « Où sont passées votre dignité et votre indépendance ? »
« Allo la Fnac, vous préférez vendre “Mein Kampf” qu’un jeu parodique sur les activistes antifascistes ? » s’est aussi révolté le député LFI des Bouches-du-Rhône Manuel Bompard.
Même argument du côté de Thomas Portes, qui indique que l’enseigne met en vente un livre de Jean Mabire, « écrivain d’extrême droite, proche des milieux néofascistes, qualifié par Marie-José Chombart de Lauwe “de plus grand spécialiste de la réhabilitation du nazisme” ».

La Fnac cède à l’extrême droite, sur Mediapart

lundi 28 novembre 2022 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié sur Mediapart le 28 novembre 2022.

La Fnac cède à l’extrême droite et retire un jeu de société « Antifa »

Des tweets énervés et mensongers émanant de l’extrême droite et d’un syndicat de commissaires de police ont convaincu l’enseigne de retirer un jeu de société édité par Libertalia. L’éditeur-libraire croule depuis sous les commandes.

« Depuis hier soir, c’est un flot de commandes incessant. Notre seul souci, c’est le stock. On avait tiré 4 000 exemplaires du jeu, ce soir il n’y en aura plus. »
Nicolas Norrito, cofondateur des éditions Libertalia et de la librairie du même nom, à Montreuil, est un homme fort occupé quand nous le contactons par téléphone, lundi 28 novembre. Libertalia est l’éditeur du jeu de société Antifa, un jeu collaboratif dans lequel les joueurs et les joueuses doivent s’entraider pour monter un groupe antifasciste. Le jeu en est à sa deuxième édition. Outre les librairies indépendantes, on pouvait également le trouver à la Fnac et sur le site de la grande enseigne.
Du moins jusqu’à dimanche soir. Répondant à un tweet du très droitier syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN), la Fnac a annoncé, à 18 h 09 dimanche 27 novembre que la « commercialisation de ce “jeu” », qui a « pu heurter certains de [leurs] publics », ne sera plus « disponible dans les prochaines heures ». « Deux heures plus tard, raconte Nicolas Norrito, le jeu n’était effectivement plus disponible sur le site de la Fnac. »
Dans son interpellation, le SCPN ne faisait pas dans la dentelle, accusant la Fnac de « mettre en avant les antifas, qui cassent, incendient et agressent dans les manifestations ». Que la Fnac cède ainsi à un syndicat de policiers serait déjà grave, a fortiori quand les accusations ne portent pas sur la réalité du jeu en question, mais le pire est ailleurs : le tweet du SCPN intervient en réalité après plusieurs autres, émanant de deux députés du Rassemblement national (RN) et d’un eurodéputé Reconquête, le parti d’Éric Zemmour.
C’est en effet le tweet de Jérôme Rivière, élu au Parlement européen, qui a ouvert le bal dès le 25 novembre. Il y a eu ensuite celui de Grégoire de Fournas, député RN de Gironde, samedi, dans lequel il demande des comptes à la Fnac en mentant sur le contenu exact du jeu Antifa. Puis quelques heures plus tard, l’accusation est relayée par Victor Catteau, député RN du Nord, qui trouve « absolument scandaleux » que la Fnac mette « à l’honneur les antifas, ces groupuscules haineux qui ne connaissent que la violence pour s’attaquer à notre démocratie et à ce que nous avons de plus cher dans notre pays ».
Contacté par Mediapart, le service de presse de la Fnac nous a répondu par un laconique : « Nous ne ferons aucun commentaire. » « Qu’on soit retiré de la Fnac, on s’en fout », réplique Nicolas Norrito. Celui-ci se dit tout de même « navré » que l’enseigne balaye ainsi son héritage. La Fnac a en effet été créée par d’anciens trotskistes, et notamment Max Théret, qui a combattu les fascistes en Espagne entre 1936 et 1938.
Quant aux accusations portées contre le jeu, le patron de Libertalia s’en défend : « L’objectif de ce jeu n’a jamais été de faire du buzz, il n’y a pas de caillassage de fourgons de police ni de batte de baseball. L’élément le plus radical, c’est un jet de cacatov sur une manifestation d’extrême droite ! » Le cacatov, c’est l’équivalent du cocktail molotov, mais où le liquide inflammable a été remplacé par des excréments.
Plus sérieusement, Nicolas Norrito estime que ce n’est pas un « bon signal » que la Fnac « recule face à un responsable politique qui a lancé dans l’Assemblée un “Qu’il retourne en Afrique !” », en référence à Grégoire de Fournas, exclu quinze jours de l’hémicycle pour cette saillie. « Pourquoi ne pas retirer aussi nos autres ouvrages ? Le livre sur Rino della Negra, footballeur et partisan, la Fnac en a vendu plein, c’est pourtant dans le même esprit d’émancipation et de critique que le jeu ! »
Ces dernières années, les groupes antifascistes ont été régulièrement dénoncés par la droite et/ou l’extrême droite. Un mouvement particulièrement marqué aux États-Unis sous la présidence de Donald Trump, où les républicains avaient même tenté de légiférer pour interdire ces groupes.
En France, l’extrême droite dénonce régulièrement ces militants, accusés de violences diverses. Mais le gouvernement n’est pas en reste. Gérald Darmanin avait tenté en mars de prononcer la dissolution du Groupe antifasciste Lyon et environ (Gale), avant que cette dissolution ne soit suspendue par le Conseil d’État. Gérald Darmanin avait également annoncé la dissolution de Nantes révoltée, sans que celle-ci ne soit jamais prononcée.
Lundi, l’extrême droite criait victoire sur Twitter. Dans la vraie vie, une nouvelle commande du jeu Antifa a été lancée et devrait être disponible dès janvier.

Christophe Gueugneau

Censure du jeu Antifa par la Fnac dans Libé

lundi 28 novembre 2022 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié par Libération le 28 novembre 2022.

La Fnac censure un jeu antifasciste à la demande de l’extrême droite

L’enseigne a cédé à une campagne mensongère menée par un député RN. Elle continue de proposer à la vente des livres antisémites et conspirationnistes.

Le député RN Grégoire de Fournas demande, la Fnac s’exécute. Le député lepéniste, connu pour sa saillie « qu’il(s) retourne(nt) en Afrique » à l’Assemblée nationale qui lui a valu d’en être exclu quinze jours, s’est indigné ce samedi sur Twitter qu’un jeu antifasciste soit en vente sur le site de la Fnac. Fondée sur des mensonges, mais largement relayée dans les cercles d’extrême droite, la polémique a même entraîné le syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN). Dimanche soir, la grande enseigne a annoncé faire « le nécessaire pour que [ce jeu] ne soit plus disponible dans les prochaines heures » sur son catalogue.
Retour sur une polémique montée de toutes pièces. Étape 1 : les éditions Libertalia et le collectif antifasciste La Horde rééditent dans une version simplifiée « Antifa : le jeu », un outil de formation à destination des militants qu’ils avaient sorti à la rentrée 2021. Étape 2 : comme a pu le constater Libé, les militants d’extrême droite et quelques influenceurs de second rang s’indignent dans l’entre-soi de la fachosphère… Cercles visiblement poreux puisque, étape 3, le député RN Grégoire de Fournas s’en empare. Samedi midi, il poste sur Twitter une image du jeu accompagnée de ce message : « Case 1 : je bloque une fac. Case 2 : je tabasse un militant de droite. Case 3 : j’attaque un meeting du RN. Case 4 : je lance un cocktail Molotov sur les CRS. » Et de conclure : « La Fnac vous n’avez pas honte ? »

Polémique bâtie sur un mensonge

Très vite, la polémique enfle, poussée par les utilisateurs d’extrême droite du réseau social. Jusqu’à ce que le SCPN se joigne au chœur des indignés et que la Fnac finisse par réagir. Toujours sur Twitter, l’entreprise a répondu au syndicat policier : « Nous comprenons que la commercialisation de ce “jeu” ait pu heurter certains de nos publics. Nous faisons le nécessaire pour qu’il ne soit plus disponible dans les prochaines heures. » Contactée ce lundi matin, l’entreprise se refuse à d’autres commentaires et renvoie vers ce tweet.
Cette polémique est pourtant bâtie sur un mensonge. « Il n’est absolument pas question de tabasser des militants d’extrême droite dans ce jeu ! », précise Nicolas Norrito des éditions Libertalia, qui produisent ce jeu avec le collectif antifasciste La Horde. « C’est un outil de formation, un jeu de cartes avec des dés… Casser du flic ? Mais il n’en est absolument pas question. Nous sommes de longue date militants antifascistes, on a fait attention à ce que tout soit inattaquable juridiquement. Et il est hors de question qu’un jeune se fasse casser la gueule parce que le jeu l’aurait galvanisé. »
Le concept, poursuit Norrito, « c’est que tu gagnes si tu es capable de monter des actions à plusieurs, comme des blocages, des manifs ou créer un podcast, et de les réussir. Nous avons refusé le sensationnalisme et, si la question de la violence est bien posée dans le livret d’appareillage critique qui accompagne le jeu, c’est uniquement sous le prisme de l’autodéfense ». Bref, « rien de tout ce que Grégoire de Fournas affirme, et on attend d’ailleurs qu’il montre les cartes en question » prouvant ces violences qu’il dénonce, soutient Nicolas Norrito.

Des livres antisémites à la Fnac

Surtout, il dit tomber des nues. Le jeu attaqué ici, disponible depuis le 10 novembre, est ainsi une deuxième édition de la version initiale sortie à la rentrée 2021 et dont les 4 000 exemplaires produits ont été vendus en quelques mois. Il était d’ailleurs déjà proposé sur le site de la Fnac, qui en a écoulé plus de 400 exemplaires l’année dernière selon Nicolas Norrito, sans que ça ne pose de problème. La nouvelle version a même été recommandée dans L’Éclaireur Fnac. Le 6 novembre, ce site de prescription tenu par les équipes éditoriales du groupe, décrivait : « Pensées au départ comme un simulateur tout à fait sérieux pour les mouvements libertaires, les mécaniques d’Antifa ont été simplifiées afin de devenir un jeu de société accessible au public. »
« La Fnac a fait une énorme erreur et se retrouve avec un bad buzz colossal, estime Nicolas Norrito. Si elle retire ce jeu, qu’elle retire aussi nos livres sur ces antifascistes de la 2e DB qui ont libéré Paris en 1944 par exemple. » En attendant, sur les réseaux sociaux, les messages de soutien affluent. « Nous avons eu 300 commandes rien que cette nuit sur notre site, le jeu est déjà en quasi-rupture. » De nombreux internautes interpellent également la Fnac car son catalogue ou sa marketplace (où des revendeurs peuvent proposer leurs propres articles) proposent des auteurs antisémites par exemple. Comme les ouvrages du multicondamné pour incitation à la haine raciale Alain Soral ou encore le livre Le Mythe du XXe siècle de l’idéologue nazi Alfred Rosenberg. Questionné sur ce point, le service communication du groupe Fnac Darty n’a pas non plus souhaité faire « d’autres commentaires ».

Par Pierre Plottu et Maxime Macé

Le jeu Antifa retiré de la vente par la Fnac

lundi 28 novembre 2022 :: Permalien

Sur la base d’allégations mensongères émanant de l’extrême droite puis des forces de répression, la Fnac vient de retirer de la vente Antifa le jeu, l’outil de formation conçu par La Horde et Libertalia.
Vous ne nous ferez pas taire !

Simone Weil et Rosa Luxemburg dans CQFD

mercredi 23 novembre 2022 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié dans CQFD, novembre 2022.

Cap sur l’utopie

« La révolution est magnifique, le reste est foutaise » (Rosa Luxembourg)

Les insubmersibles éditions Libertalia nous proposent deux rencontres captivantes avec des militantes révolutionnaires passées à l’histoire.

Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale

Considérée par la philosophe Simone Weil comme son grand-œuvre, Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale (1934) propose une analyse implacable de la subordination du travailleur au capital, débouchant sur l’idée que l’esclavage se niche dans le travail lui-même, « dans la manière, poursuit le commentateur du livre Robert Chenavier, dont se succèdent les gestes d’un travailleur qui n’est pas maître de leur enchaînement, ni du temps, ni du rythme de son activité ». Dès lors « l’instant décisif quant à l’asservissement du travailleur n’est plus celui où, sur le marché du travail, l’ouvrier vend son temps au patron mais celui où, à peine le seuil de l’usine franchi, il est happé par l’entreprise ». D’où l’une des contradictions clés de Marx, qui ne peut jamais expliquer pourquoi les forces productives tendraient à s’accroître « providentiellement » puisqu’il est empêtré, pour sa part, jusqu’au kiki, dans sa propre providence providentielle : la croyance mystique en la mission historique du prolétariat. Mais Simone Weil n’en reste pas là dans son repérage des « niaiseries » marxiennes. Elle accuse l’idéologue allemand d’adopter puérilement pour le déchiffrement de l’histoire humaine le principe de Lamarck selon lequel « la fonction crée l’organe » et selon lequel, corollairement, le cou de la girafe se serait allongé tellement l’animal aurait essayé de manger des bananes. Puis, après avoir cloué au pilori la religiosité du matérialisme pas très dialectique de Marx et son lamarckisme candide, la polémiste s’amuse à retourner contre Marx des critiques que celui-ci adressait à Hegel. On comprend qu’avec ses raisonnement sagaces et doctement documentés, Simone Weil n’a jamais cessé de porter sur les nerfs des marxistes rigoristes.

Commencer à vivre humainement

Un recueil fort bien foutu de missives cinglantes qu’expédia la cofondatrice du Parti communiste d’Allemagne :
– entre 1895 et 1905, à l’agitateur lituanien juif polonais Leo Jogiches à qui elle reproche son autoritarisme rêche ;
– à son amie la poétesse socialiste néerlandaise Henriette Roland Holst à qui elle confie son vif intérêt pour les mouvements conseillistes insurrectionnels hollandais prenant de plus en plus d’ampleur et aimantés, entre autres, par les agitateurs antibureaucratiques Herman Gorter et Anton Pannekoek ;
– entre 1906 et 1914, aux leaders sociaux-démocrates Karl et Luise Kautsky à qui elle transmet son enthousiasme pour quelques innovations à l’intérieur du mouvement ouvrier : le versement par les travailleurs actifs d’une semaine de leur salaire aux chômeurs, le refus catégorique par les prolos du moindre licenciement, la création spontanée dans les usines de comités décidant de toutes les conditions de travail ;
– à la fameuse meneuse révolutionnaire Clara Zetkin face à laquelle elle reconnaît que « la grande masse des camarades » en a marre du parlementarisme ;
– entre 1914 et 1918, au militant socialiste suisse Karl Moor à qui elle fait part de sa crainte de voir le parti de la révolte de plus en plus gangrené par le national-patriotisme et l’opportunisme ;
– à sa confidente Mathilde Jacob à qui elle apprend que, sur la dalle de son tombeau, on ne devra lire que deux syllabes : « Zwi-zwi », en hommage aux mésanges charbonnières qui annoncent la venue du printemps rouge.

Noël Godin