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Trop classe ! dans Libération

mardi 22 mars 2016 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Paru dans Libération, 20 mars 2016.

« Trop classe ! », trente ans d’école militante

En ce moment, son principal souci s’appelle Gyunaydan. Un bonhomme de 10 ans obligé de prendre chaque matin un bus, deux RER et un tramway pour venir à l’école. « Ça coûte 27,60 euros en tickets chaque jour, pour lui et sa mère qui l’accompagne. Je pioche dans l’argent qu’une fondation m’a donné. Mais je ne vais pas en avoir suffisamment jusqu’à la fin de l’année », soupire Véronique Decker. Elle est directrice d’une école primaire à Bobigny (Seine-Saint-Denis) depuis dix ans, au milieu d’un chantier de rénovation urbaine, entre les pelleteuses et les barres HLM en phase de démolition.
Elle y accueille plusieurs enfants roms comme Gyunaydan ou Slavi, dont Libération suit le parcours depuis plus d’un an. Après l’évacuation du camp des Coquetiers en octobre 2014, situé près de l’école, ils ont continué à s’accrocher à ce seul lien avec la société française. «  Je n’ai pas choisi d’avoir des enfants roms dans mon école. Cela s’est trouvé comme ça. […] J’aurais fait de même si des enfants du Zimbabwe étaient venus vivre à Bobigny dans les bidonvilles », écrit Véronique Decker dans Trop classe ! un petit bouquin tout juste publié sous la forme de courts chapitres piochés dans trente ans de carrière.
Véronique Decker, 58 ans, est militante, syndiquée depuis toujours, adepte de la pédagogie de Freinet. Elle écrit comme elle parle, avec aplomb, sans circonvolution, et un brin piquante. Son livre décrit l’école publique dans les « territoires » oubliés, égratigne les politiques publiques, ironise sur l’état des bâtiments…
Intitulé « Partir », le dernier chapitre se réfère à sa demande de mutation. Elle veut terminer sa carrière au vert, en Corrèze. « J’ai fini le livre comme ça, sûre d’obtenir ma mutation après mes trente et un ans d’expérience. » En fait, non. Sa demande a été refusée.

Marie Piquemal