Hors collection

Paul Roussenq L’Enfer du bagne

Bagne. Enfer. Prison. Biribi. Torture. Enfermement. Cellule. Cachot. «  On est sans nom. On n’est plus rien », disait la chanson d’Albert Londres. Résister. Tenir. La Guyane et ses îles. Ceci n’est pas une image d’Épinal. Encore moins un effet positif de la colonisation. Les coups. La faim. La damnation. Et à l’arrivée, la mort et l’abrutissement. Paul Roussenq (1885-1949) a affronté tout cela. Lui, l’anar, le bagnard de Saint-Gilles, « l’Incorrigible », a survécu aux camps de concentration à la française. Il a décrit l’horreur carcérale sous le sunlight des tropiques. Un témoignage capital. Sur le passé certes, mais tellement actuel.

Après La Vie des forçats d’Eugène Dieudonné, Libertalia poursuit son exploration du système d’enfermement en rééditant L’Enfer du bagne, un livre-clé sur Biribi et les îles du Salut. Épuisé depuis 1957, ce texte du forçat qui cumula le plus de jours de cachot en Guyane est présenté par Jean-Marc Delpech, docteur en histoire, auteur d’Alexandre Jacob, l’honnête cambrioleur (ACL). Il est illustré par Laurent Maffre, artisan de deux adaptations graphiques de L’Homme qui s’évada d’Albert Londres et Les Chambres du cerveau, d’après Stevenson (Actes Sud BD).

Un extrait est à lire sur notre blog.

Sur la toile

 Le site du dessinateur Laurent Maffre

Revue de presse

 Le Monde des livres, 23 avril 2009
Paul Roussenq, l’incorrigible. Dans un univers aussi féroce que celui des bagnes, poser un geste humain relève de la sainteté. Pour avoir passé vingt et un ans dans les geôles de Cayenne, Paul Roussenq (1885-1949) en savait quelque chose. Lorsqu’il saluait la bienveillance de tel ou tel médecin militaire à l’égard des prisonniers, cet anarchiste usait spontanément d’un lexique religieux : « Leur mérite était d’autant plus grand qu’ils n’en attendaient aucune récompense, se sacrifiant obscurément dans le cours de leur apostolat », notait-il dans L’Enfer du bagne. Publié une première fois en 1957, ce bref témoignage décrit chaque aspect du système pénitentiaire propre à « Biribi ». Il est rédigé d’une plume sensible, qui conjugue la précision du document et l’intensité de la révolte. Roussenq y évoque non seulement l’horreur carcérale, le sadisme des gardes-chiourmes et le triomphe des mouchards, mais aussi les rares espaces de complicité entre forçats : par exemple, le jeu des devinettes, au fond du cachot, à travers les bouches d’aération. Ou encore, par-delà la violence en général et les viols en particulier, le discret déploiement des amours masculines : « Ces unions spéciales sont génératrices d’amitiés souvent profondes », écrit Roussenq. Bagnard incorrigible, réfractaire jusqu’à la folie, celui-ci multiplia les outrages contre les magistrats et les surveillants. Au point que certains de ses anciens codétenus le soupçonnèrent de « se plaire en cellule ». Lui-même justifiait son attitude par un refus viscéral de l’injustice : « On ne me demandait que d’être neutre, de ne plus me faire l’avocat des autres. (...) À ces offres de capitulation, je répondais par la lutte à outrance. » Et au journaliste Albert Londres, qui popularisa son cas en 1923 et qui était venu le visiter dans son cachot de l’île Saint-Joseph, Paul Roussenq confia simplement : « Je ne puis croire que j’ai été un petit enfant. Il doit se passer des choses extraordinaires qui vous échappent. Un bagnard ne peut avoir été un petit enfant. » Jean Birnbaum.

 L’Humanité, mai 2009
Une fois de plus, Libertalia explore l’univers du bagne et, plus généralement, la question de l’enfermement et de la privation de liberté en rééditant le texte de Paul Roussenq, dit « l’Inco ». Pour « incorrigible ». Car, si Jacob Law a passé « dix-huit ans au bagne », Roussenq, lui, passera dix-huit ans au trou ! Mais son texte, contrairement à celui de Law, cache ce refus obstiné de la discipline derrière une description clinique qui n’est pas sans rappeler le détachement d’Eugène Dieudonné dans la Vie des forçats. Au point qu’on en ressortirait presque frustré si, en préface, Jean-Marc Delpech, spécialiste du bagne, ne remettait en perspective un personnage hors du commun, dont le livre fut édité en 1957 par un catholique prenant quelques libertés avec les convictions et les conclusions de Roussenq. Là, fort heureusement, il n’y a que les illustrations qui détonnent. Il suffit de sauter quelques pages. SH.

 Le Monde libertaire, 9 avril 2009
Que ceux qui pensent trouver là, sous la plume de Roussenq, une énième description des bagnes, spectaculaire et anecdotique à la fois, se ravisent ; et les amateurs d’histoire qui, blasés, croient avoir affaire à un nouvel ouvrage érudit en seront aussi pour leurs frais. Le travail de Roussenq n’a rien de cela, et pourtant, il est essentiel à la compréhension du quotidien d’un forçat de Cayenne et s’adresse tant aux amateurs qu’aux profanes. Cette qualité est importante. Daniel Vidal

Le livre dans l'agenda

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Le livre dans le blog

Illustrations : Laurent Maffre
Préface : Jean-Marc Delpech
Postface : Albert Londres
136 pages - 10 euros
Parution : 02/03/09

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