Éditions Libertalia
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> La Terrorisation démocratique
« Il aura fallu – il s’agit ici d’inventorier les éléments d’une situation pour l’analyser et non d’en faire grief aux uns ou aux autres – l’affaire de Tarnac, mettant en cause de jeunes militant(e)s anticapitalistes, cultivé(e)s et diplômé(e)s, d’origine bourgeoise et chrétienne, que l’on dirait dans les fichiers de police d’un « type caucasien » (comprenez : Blancs), pour que certaines personnalités expriment des critiques à l’égard de l’antiterrorisme. »
L’affaire dite « de Tarnac », en novembre 2008, a révélé au grand public l’existence d’un arsenal législatif censément destiné à lutter contre le terrorisme. Mis en place à partir de 1986 par les gouvernements de gauche comme de droite, il a trouvé une nouvelle légitimité depuis les attentats du 11 septembre 2001 et de nouveaux moyens dans les dispositifs européens. Bien avant Tarnac, il a permis d’arrêter, dans l’indifférence générale, des centaines de prétendus « islamistes », le plus souvent relâchés après de longs mois de détention. Ce sont maintenant des militants révolutionnaires qui font les frais de textes sans cesse révisés et durcis.
L’auteur présente ici la définition européenne du terrorisme, puis il analyse les mécanismes et la signification de cette « terrorisation démocratique » qui concerne et vise les étrangers et les jeunes (deux figures dangereuses combinées), mais aussi tous ceux qui peuvent, à un moment ou un autre, contester l’injustice du système capitaliste.
Claude Guillon (1952-2023) a publié avec Yves Le Bonniec en 1982 Suicide, Mode d’emploi, une réflexion sur le droit à la mort. Vendu à plus de 100 000 exemplaires, le livre sera interdit neuf ans après sa parution. Spécialiste de la Révolution française et des libertés publiques, il est l’auteur d’une douzaine d’ouvrages, parmi lesquels Deux enragés de la Révolution. Leclerc de Lyon et Pauline Léon (La Digitale, 1993) ; Pièces à conviction : Textes libertaires (1970-2000) (Noésis-Agnès Viénot, 2001) ; Je chante le corps critique (H&O, 2008) ; Notre patience est à bout. (IMHO, 2009).
– Un entretien avec Claude Guillon est disponible sur notre blog.
– Le Monde diplomatique, janvier 2010.
L’intitulé oxymorique de ce petit ouvrage pourra paraître provocateur. Mais le but de l’auteur n’est-il pas, précisément, de provoquer la réflexion sur ce qui est tenu pour une vérité intangible : nous vivons dans un « État de droit » ? En bon anarchiste, Claude Guillon ne se contente pas de récuser toute validité scientifique à cette notion destinée à légitimer la domination de classe. Textes de lois, décrets, code pénal, décisions européennes à l’appui, il montre qu’un régime policier peut se mettre en place sans rompre avec la légalité. La liste des atteintes aux fameux droits de la personne, dont le respect est censé légitimer « nos démocraties », est effarante.
Citant le philosophe italien Giorgio Agamben, outré par le caractère arbitraire et ultrarépressif de la législation antiterroriste (en particulier en France et en Italie), Guillon souligne que le problème est qu’aujourd’hui « ces mesures ne sont plus jugées antidémocratiques, mais bien au contraire nécessaires au bon fonctionnement du système et de son unité : travail exploité (salariat) plus démocratie représentative (Parlement) ». Stade suprême de la criminalisation de toutes les formes d’opposition, la « terrorisation » n’est pas l’effet d’« un raidissement autoritaire de la société », mais une stratégie concertée entre gouvernants, toutes couleurs confondues. Jean-Pierre Garnier.
– Revue Silence, décembre 2009.
Guillon rappelle opportunément que le terrorisme s’applique initialement à la politique d’État durant la période postrévolutionnaire de la Terreur. D’où sa « terrorisation démocratique » qui montre en quoi la construction de l’ennemi « terroriste » par les démocraties constitue dans le même temps une politique de terrorisation pratiquée par ces dernières.
Collection À boulets rouges
160 pages - 7 euros
Parution : 15/09/09