Éditions Libertalia
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> Trop jeunes pour mourir, dans Les Cahiers d’alter
mardi 3 février 2015 :: Permalien
Chronique parue dans Les cahiers d’alter n° 75, 26 janvier 2015.
Cent ans après la boucherie organisée par les États pour servir les intérêts capitalistes et impérialistes, des parutions ou rééditions méritent notre attention, comme Les Cahiers de guerre de Louis Barthas, tonnelier (1914-1918). Trop jeunes pour mourir – ouvriers et révolutionnaires face à la guerre (1909-1914) est, lui, indispensable. L’histoire de la Fédération communiste anarchiste, composée de jeunes ouvriers révolutionnaires, est le fil rouge, mais c’est tout le mouvement social de ces années qui est retracé : les grèves des PTT en 1909, des cheminots en 1910, du Bâtiment en 1911, mais aussi l’internationalisme, la lutte contre l’antisémitisme et les groupes réactionnaires, l’évolution (pas toujours brillante) des organisations révolutionnaires, la répression, les débats dans la CGT. Le syndicalisme est au cœur de l’histoire racontée par G. Davranche, et au cœur de l’Histoire. Sans chercher à tout propos un parallèle avec aujourd’hui, des faits, des analyses et des choix politiques y trouvent un écho incontestable. Il serait sot de ne pas en tenir compte. Les militants et (quelques) militantes de l’époque sont confronté-es à des débats essentiels : rapports du syndicalisme révolutionnaire avec les partis politiques aspirant à gérer la société, facilité à multiplier les appels à la grève générale au lieu de la construire, place des femmes ou des immigré-es dans le mouvement syndical, construction de mouvements de masse ne devant pas signifier abandon des principes, propension à se cacher derrière eux au risque de commenter l’actualité sans peser dessus, etc. La perte de repères et l’absence d’autonomie conduira la CGT à oublier ses engagements antimilitaristes et internationalistes ; de fait, le syndicalisme se fondra dans un mouvement « socialiste » (ne dirait-on pas « citoyen » aujourd’hui ?) tiré par les partisans du changement par les élections… 543 pages ? Oui, et le style, les précisions ou anecdotes fondées sur une documentation exceptionnelle, les liens avec le contexte contemporain en rendent la lecture d’une grande facilité.
Christian (SUD-Rail)