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vendredi 18 mars 2022 :: Permalien
Publié dans Liberté Hebdo, mars 2022.
Les historiens Dimitri Manessis et Jean Vigreux ont consacré une biographie à Rino Della Negra. Originaire de Vimy, ce footballeur du Red Star et résistant FTP a été assassiné par les nazis en février 1944.
Lors de la saison « 2017-2018 », Dimitri Manessis, doctorant en histoire, tombe sur une écharpe de supporters du Red Star, le club mythique de Saint-Ouen aujourd’hui en National (3e division). Il y est mentionné une tribune du nom de Rino Della Negra. C’est le début d’une aventure littéraire et historiographique menée de concert avec Jean Vigreux, son directeur de thèse d’alors.
Culture antifasciste
Le fruit de leurs investigations est paru en librairie. Eclairant un certain nombre de zones d’ombre, l’ouvrage évoque l’itinéraire de ce « footballeur et partisan » né à Vimy le 18 août 1923. Originaire du Frioul, son père travaille en effet comme briquetier dans l’Arrageois avant de gagner Argenteuil, trois ans plus tard. C’est dans cette ville de la banlieue rouge de la région parisienne que Rino grandit. En février 1943, il devient réfractaire au Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne et entre dans une semi-clandestinité. Dans le quartier italien de « Mazzagrande », la culture internationaliste et antifasciste est omniprésente. D’aucuns ont fui l’Italie de Mussolini. D’autres sont allés combattre Franco en Espagne. Aussi Rino a tôt fait de franchir le pas de la résistance à l’occupant nazi. Au sein du groupe Manouchian (FTP/MOI), il fait ses premiers pas dans la lutte armée. Il signe pourtant au Red Star Olympique à l’été 1943. Aussi incroyable que cela puisse paraître, « avec de faux papiers et une nouvelle adresse, il a été recruté, s’est entraîné, a joué… sous son vrai nom, sans être repéré », signale Dimitri Manessis. Arrêté à Paris en novembre 1943 suite à un attentat contre des convoyeurs de fonds allemands, il est, comme Cesare Luccarini (originaire de Pont-à-Vendin), Robert Witchitz (Abscon) et d’autres partisans du groupe Manouchian, fusillé au Mont-Valérien le 21 février 1944.
Adulé au Red Star
Pour nourrir leur récit, les auteurs se sont appuyés sur des archives inédites, familiales notamment, avec à la clé une biographie largement renouvelée de Rino Della Negra. Ils apportent d’utiles précisions sur les circonstances de son arrestation et la façon dont a été mené le procès des « Manouchian ». Ils interrogent tout autant les motivations de l’haineuse campagne de dénigrement menée par les autorités d’occupation à travers la diffusion de la fameuse « Affiche rouge » chantée plus tard par Léo ferré, tordant au passage le cou au mythe d’une responsabilité du PCF dans le démantèlement du groupe. Enfin, Dimitri Manessis et Jean Vigreux reviennent largement sur la façon dont sa mémoire a été entretenue depuis la Libération tant à Vimy où le PCF lui rend hommage chaque année en février que du côté de Saint-Ouen où régulièrement les supporters du Red Star chantent les louanges de cette « icône de l’antifascisme ».
Jacques Kmieciak